Quinze jours…déjà. Je suis arrivé à Albi.

Bergerac est déjà loin et ces premiers jours de route m’ont permis d’en savoir un peu plus à la fois sur le matériel et sur ma condition physique.

Ulysse est lourd, un peu trop. Les premières pentes ont eu vite fait apparaître cette évidence. De 4 ou 5 Km/heure sur le plat, ma vitesse (si toutefois on peut parler de vitesse!) passe à 2 voire 1 Km/h dans les côtes. A chaque montée, Ulysse voudrait faire demi- tour et je dois l’en empêcher en le poussant, arcbouté, pour le forcer à poursuivre l’aventure.

Lorsque je stoppe pour mettre ma main droite sur mon coeur, ce n’est pas pour chanter la Marseillaise, mais pour tenter de calmer mon coeur qui s’emballe. Il est vrai que je l’ai pris par défaut. Mon coeur avait bien entendu parler de ce sympathique projet à son image, mais il croyait l’histoire enterrée avec la liste des projets avortés, au fond d’un tiroir ou d’une malle remplie de vieilles cartes routières. Alors je comprends la surprise de mes ventricules et aortes devant ce soudain flux sanguin à gérer. Pas de veine, il faut repartir au charbon! D’ailleurs, gravissant la pente bras tendus derrière Ulysse, la langue léchant le bitume, je m’imagine en train de pousser un wagonnet dans une mine à charbon.

Le tracé de cette nouvelle aventure est né sur une carte de France Michelin.

Son échelle au 1/1 000 000 m’a permis d’atteindre mes rêves et d’y dessiner l’itinéraire au crayon à papier. Traits hésitants, effacés puis retracés. Maintenant que je suis sur le terrain, chaque petit bout d’un centimètre tracé sur la carte me prend trois heure d’efforts!

Durant ces premières journées j’ai fais de belles rencontres. Assez peu nombreuses pour m’en souvenir parfaitement, et certaines resteront gravées dans ma mémoire. Mais comment suis-je apparu aux yeux des passants et des conducteurs me croisant ou me doublant? Ne croyez pas que ce soit l’enthousiasme. Sur cent véhicules que je croise et pour qui parfois je me gare pour faire la place, une seule main va éventuellement se lever… Est-ce que la crise mondiale a autant plombée d’atmosphère d’une chape de peur pour mettre au rebus tous les gestes de politesse élémentaires? Un matin cependant, en quittant mon bivouac pour affronter à froid, tête baissée l’une des plus forte ascension de ce debut de parcours, je fis une belle rencontre. Lorsque je parle de « belle rencontre » je ne prétends pas à une rencontre hors du commun, mais juste une rencontre aimable, courtoise, humaine quoi! L’homme etait occuppé dans une petite parcelle de terre à ramasser puis à aller entasser au bout du champ ce qui aurait ressembler à des pommes de terre. En cette saison? Diable, terriblement en avance dans le coin! Mais en guise de patates c’était des gros cailloux. » Tous les ans c’est à refaire! » m’indique t-il ». « Et ça repousse tous les ans? » je lui demande. Ben oui apparemment en travaillant la terre , les cailloux remontent..

J’ai dû repousser sa très sympathique proposition visant à me hisser avec sa voiture au sommet de la côte. « Non, merci, ce serait de la triche! mais merci quand même! »

Ainsi va le voyage avec parfois ses petites touches de bonheur et leçons de vie

L’une de mes premières leçons est d’ailleurs venue de ma petite caméra embarquée fixée à l’avant et avec laquelle je me filme parfois!

Si en matière de cheminement intérieur il est évident qu’il faut se recentrer sur soi-même à l’écoute de son être véritable, en matière de vidéo c’est exactement l’inverse. Je l’ai compris à mes dépens, après avoir loupé une séquence vidéo qui aurait été super. La rencontre avec cette dame âgée dans son R5 rouge. Désolé vous ne l’a verrez jamais, la caméra n’était pas tournée vers elle, et je n’ai pas osé la tourner en cours de conversation…

Quelle belle autre rencontre Dimanche dernier après une après-midi de pluie et de grêle. Aucun abri à l’horizon avant que guider par ma bonne étoile et ma petite voix, je biburque sur ma gauche. Pourquoi là? L’homme qui visiblement m’attends se prénomme Maurice. Il acquiesse immédiatement à ma demande de dormir à l’abri dans une dépendance de la ferme avant d’ajouter:  » mais c’est possible aussi dans une chambre! » Et voilà comment en quelques minutes on passe du statut d’errant solitaire sous la pluie à celui d’un homme bien installée dans une chambre et sa salle d’eau attenante. Un grand merci à Monsieur Maurice et aux energies divines qui, je l’ai ressenti encore beaucoup plus ce soir là, me guident.

Ma petite voix me dit: « Laisse toi guider! On est là » . Merci là-haut.

Rencontre dans le Lot-et-Garonne. Vidéo sans montage. Voilà ce qui arrive lorsqu’on tourne sa GoPro vers l’extérieur…